Ce jeudi, l’ensemble des accusés du procès de l’Elbchaussee étaient invités à parler une dernière fois devant le tribunal de Hambourg. Il s’agissait des ultimes déclarations avant le verdict attendu le lendemain. Parmi les quatre co-accusés qui comparaissent aux côtés de Loïc, un seul a souhaité prendre la parole, brièvement, remerciant ses proches pour leur soutien dans cette longue épreuve. Loïc s’est ensuite exprimé durant une vingtaine de minutes. Comme lors de sa première déclaration, quinze personnes seulement ont été autorisées à entrer dans la salle d’audience, sous prétexte de limiter les risques sanitaires.
Voici le texte complet de cette déclaration, lue en français par notre ami puis traduite en allemand par son interprète.
« Pas de police, pas de problème »
Ainsi, me menace-t-on de 4 ans et 9 mois de prison ferme avec mandat de dépôt. Dont 3 années correspondent à des choses que je ne suis pas accusé d’avoir personnellement faites mais dont je suis rendu complice.
La plupart des gens ne sont pas fans du G20. Aucune manifestation pro-G20 n’a d’ailleurs eu lieu à Hambourg, sauf peut-être celle des 30 000 policiers qui ont décidé d’interdire toute circulation si vous n’êtes pas une voiture de police ou un véhicule de luxe transportant les participants au sommet.
En postant sur Youtube une Compile des violences policières du G20 de Hambourg de 15 min, j’ai vu dans mes recherches qu’Olaf Scholz, ancien maire de Hambourg, avait déclaré : « Ceux qui ont commis des actes de violence, ce ne sont ni les policiers, ni les organisateurs du sommet du G20 ». Puisqu’il suffit d’affirmer un mensonge pour qu’il devienne la vérité, sachez que je n’étais pas au G20 de Hambourg.
Je crois que ce procès irait beaucoup plus vite si l’accusation se limitait à ce que chaque individu est accusé d’avoir personnellement fait. Ces nouvelles notions de complicités et de « co-auteurs » qui permettent d’accuser de l’ensemble des choses qui se passent dans une manifestation sont des abus du pouvoir judiciaire. Une des revendications des révoltés de Hong Kong est « le retrait du terme « émeutiers » pour qualifier les manifestants car cette formulation permet des arrestations beaucoup plus nombreuses pour des motifs minimes ». La Chine était présente à Hambourg. Ce long procès est basé sur une même criminalisation des manifestations ainsi que l’utilisation de la reconnaissance faciale. C’est à se demander si la « mainmise de Pékin » sur Hong Kong n’aurait pas déposé quelques doigts sur Hambourg.
Lors d’une manifestation, on n’a jamais accusé un policier d’une violence qu’un autre policier aurait réalisée. D’ailleurs, on n’accuse quasiment jamais de policier tout court. Il existe des réglementations sur l’usage de la force, mais lorsque la police ne respecte pas sa propre déontologie, aucun procès. Et je m’abaisse là sur le terrain des conditions purement légalistes. Car que l’on me matraque au crâne ou dans les règles de l’art de l’usage considéré comme légitime de la force, mon sentiment de révolte reste le même. Mon indignation ne s’arrête pas à l’appréciation anatomique de la violence subie.
Max Stirner écrivait : « Aux mains de l’individu la force s’appelle crime, aux mains de l’État, la force s’appelle droit ». Je crois que lorsqu’un usage de la force s’exprime, il doit-être questionné dans chaque situation, et ne surtout pas devenir une normalité, un droit immuable.