NEWS / 11 NOV. PRISE DE PAROLE DE LOÏC DEVANT LE TRIBUNAL

Cher.e.s ami.e.s,

Après plus d’un an de détention et dix mois à comparaître devant le tribunal d’Hambourg, Loïc a demandé a prendre la parole. Notre ami souhaite faire une déclaration devant la Cour, déclaration dont nous ne savons rien du contenu. Rappelons-nous, son procès – et celui de ses 4 autres co-accusés – a débuté le 17 décembre dernier. Il s’étale depuis au rythme de quelques audiences par semaines, parfois moins. En tout ce sont plus de 40 journées d’audience qui ont eu lieu désormais, à huis clos. Durant ces longues heures à écouter les témoins se contredire et la police s’engluer dans son mensonge, Loïc n’a pu s’exprimer qu’à de très rares occasions, pour répondre à des questions techniques.

Sa demande a été transmise par ses avocat.e.s et acceptée par la Cour. Le 11 novembre prochain, Loïc prendra donc la parole devant le tribunal d’Hambourg. Il a demandé à s’exprimer durant une trentaine de minutes et, surtout, a obtenu que le procès Elbchaussee soit à nouveau ouvert au public le temps de cette déclaration. Notre ami a expliqué qu’il ne souhaitait pas s’adresser aux seuls robes noires mais à tout le monde, à ses soutiens, aux ami.e.s allemand.e.s, au public habituel d’un procès.

Si vous souhaitez venir soutenir Loïc lundi prochain, n’hésitez pas à contacter le groupe de soutien à cette adresse : soutienloic[at]riseup.net. Il nous est possible d’organiser des trajets, des hébergements et d’aider financièrement.

Liberté pour Loïc et pour toutes les personnes incarcérées !

TRADUCTION / Résumé des audiences du procès Elbchaussee des 20 et 25 septembre 2019

La journée du 20 septembre a été une journée intense concernant l’examen des vidéos. Tout d’abord, la défense de Loïc a contesté une fois de plus ce type d’expertise. Comme d’habitude, la Chambre a rejeté les oppositions. Ces objections ont cependant au moins servi à discuter du sens et des enjeux de l’examen des vidéos. La Chambre a décidé, pour des raisons de transparence, de visionner (à nouveau) pendant l’audience principale les vidéos avec les parties concernées. Il s’agissait de clarifier quels passages seraient pertinents selon le tribunal, quelles conclusions (préliminaires) sont à en tirer, etc. Si tout cela n’est pas « formel » parce que consigné nulle part (c’était d’ailleurs l’objet des contestations de la défense de Loïc) au moins nous savons tous où nous en sommes. Nous avons ensuite regardé de nouveau les vidéos envoyées par les témoins.

Le 25 septembre, les premiers témoins (« représentants mandatés ») des différents propriétaires des maisons endommagées sur la Max-Brauer-Allée ont été entendus. Ils ont apporté des documents de facturation pour la réparation des dommages. Les calculs des dommages sont parfois complètement confus, parce que les montants des demandes d’indemnisation présentés sont différents selon les interlocuteurs (ex. : les montants diffèrent entre ce qui a été demandé au fond d’indemnisation de la ville et aux assurances privées). Il y en aurait pour plusieurs mois de travail, si la Chambre n’avait pas déjà communiqué qu’elle allait se baser sur des estimations pour définir le montant des dommages. Ce travail d’estimation va cependant demander encore pas mal de clarifications pendant les audiences principales.

Ce fut ensuite le tour du témoin Waldorf, le « chef de la police locale » de l’unité de la police fédérale « Blumberg » qui est intervenue à la gare d’Hambourg-Altona. Il a rapporté, que dans la matinée du 07.07.2017, il a reçu l’ordre de mener à l’aide de deux unités, une mission d’identification des participants aux manifestations. Ils avaient rendez-vous à la gare d’Altona et devaient ensuite aller jusqu’au centre-ville. Son unité aurait repris la mission de « l’unité d’intervention » du Blumberg, qui est plutôt prévue pour les opérations musclées, mais qui avaient été déployée ailleurs : près du quartier Reeperbahn selon le témoin.

Les participants à la manif à la gare étaient de type classique. Une troupe a accompagné les personnes dans la gare d’Altona, Waldorf dit être resté là avec sa troupe. A un moment donné, il a vu un groupe de personnes en habits sombres et masquées. D’après son « comptage rapide » ils étaient environ 100 personnes. 10 a 20 d’entre elles se sont précipitées sur eux et leur auraient jeté des pierres (« une pluie de cailloux »). Ils ont été contraints de se retirer. Lui et ses collègues sont montés dans leurs véhicules et ont circulé autour de la gare puis à nouveau en direction des « fauteurs de trouble ». Ces derniers étaient déjà partis. De toute sa carrière de policier et encore maintenant, il n’avait jamais dû battre en retraite. C’était la première fois. A part sur le parking de la gare avec son supérieur, et malgré des questionnements insistants de la cour, il n’a plus jamais voulu reparler de cette intervention (intervention désastreuse selon la police de Blumberger). Il a communiqué plusieurs fois avec la centrale de la police fédérale. Tout a été documenté et enregistré.

Sur place, il s’est également entretenu avec un policier en civil, mais c’était clairement avant l’apparition du groupe. Ce dernier est soudain apparu devant leur véhicule et – après s’être fait connaître – s’est entretenu avec eux. Il ne se souvient pas d‘un autre policier en civil, qui aurait crié « on se rhabille, on se rhabille ! ». Il y avait donc selon ses déclarations 4 policiers en civil en lien avec l’apparition de ce groupe de personnes cagoulées : les deux policiers mentionnés ci-dessus et messieurs Dangschat et Scheller (tous deux du PK21*). Pour Dangschat/Scheller, il ressort des documents qu’ils ont fuit vers le PK21. Pour les autres, il n’est pas clair jusqu’où cette mission en civil est allée quand l’action a commencé.

Enfin, la Chambre a annoncé une décision rejetant la poursuite de l’interrogatoire des experts Wittwer-Backofen (chargés de l’identification de Loïc sur la base de matériel photographique). La Chambre ne souhaite pas – alors que la défense l’a demandé – envoyer à l’expert d’autres documents vidéo pour déterminer si d’autres personnes dans le matériel vidéo présentent également les caractéristiques « anthropomorphiques » de la personne retenue comme étant Loïc. La raison invoquée par la Cour est qu’elle dispose d’une expertise suffisante après que les experts eurent été entendus pour la première fois. La Cour précise également que la défense a de toute façon sa propre expertise, ce qui est un peu sournois. La Chambre s’est appuyé sur le fait que lors de l’interrogatoire sur la vidéo, la défense a posé des questions sur d’autres personnes. La Chambre se réfère donc maintenant directement au comportement de la défense à l’audience principale afin de rejeter les demandes d’investigations. C’est quand même un peu vache…

Le 23.10. le procès devrait se poursuivre après un mois de pause. Pour le 06.11. une discussion juridique est prévue, dans laquelle il s’agit de traiter de la question de la complicité et de la responsabilité éventuelle des personnes présentes à une manif pour les infractions commises pendant celle-ci.

* Le Polizei-Kommissariat 21 est un commissariat du quartier d’Altona à Hambourg.

Source: https://unitedwestand.blackblogs.org/elbchaussee-prozess-am-20-09-19-25-09-19/

ANALYSE / Escalade de l’arbitraire, procédure disciplinaire & libération d’un oiseau

Ce texte écrit par Loïc depuis la prison de Hambourg nous est parvenu récemment. Les traductions placées entre crochets sont de notre fait. Dans la version manuscrite, les dialogues sont pour l’essentiel écrits uniquement en allemand.

Les faits remontent au samedi 15 juin 2019, jour de la 4ème manifestation de soutien aux prisonniers politiques. Lorsque j’écris ces lignes au propre, nous sommes fin septembre 2019. Si j’ai laissé passer le temps, c’est parce que j’entends sans arrêt (aux promenades pendant les activités) les nouvelles prouesses de certains gardiens peu vertueux (souvent les mêmes) qui ont pu enrichir ce texte ; mais également afin de voir si la procédure disciplinaire serait ou non enclenchée. Plus de trois mois de recul et aucune nouvelle de cette procédure, je peux donc décrire l’ensemble de cette péripétie carcérale.

Ce samedi de la mi-juin, je pensais à l’anniversaire de ma petite sœur qui arrivait le lendemain et comme chaque samedi, un gardien ouvre ma porte à 13h30 pour allez au groupe de gymnastique. Il m’arrive de sauter une ou deux fois par mois ce groupe en restant dans ma cellule soit parce que j’ai mal dormi ou alors occupé à lire, penser, écouter la radio libre de Hambourg, inventer des jeux, écrire… C’était le cas ce samedi, j’informe donc le gardien que je souhaite rester en cellule. En temps normal, le gardien referme la cellule et s’en va. Mais cette fois-ci il reste, regarde un instant dans tous les sens puis soupire. À ce moment là, j’ai eu l’intuition qu’il y avait peut-être à nouveau une manifestation aujourd’hui. Il insiste : « Kommen-sie in Yoga ! » [- Venez au yoga !], je réponds encore une fois « Nein danke, ich will nicht heute » [- Non merci, je ne veux pas aujourd’hui]. Il s’en va en laissant la porte ouverte. 30 secondes plus tard, il revient « So Yoga! » [- Alors, yoga !] « Ich habe nein gesagt ! » [- J’ai dit non !]. La porte se referme. C’est certain, il y a une manifestation aujourd’hui . Je me demande alors s’ils vont me refaire le même coup que la dernière fois avec l’isolement pour rien. 14 heures, l’écho lointain de la manifestation se fait entendre. Après quelques instants, des pas accompagnés de bruits de clefs apparaissent dans le couloir, un frisson me traverse au moment où la clef tournent le verrou de ma porte qui s’ouvre, 4 gardiens sont là (contre 2 le mois dernier), l’un s’écrit :

Lui – « So ! Kommen-sie mit uns in keller ! » [- Allez, venez avec nous au sous-sol !]

Moi – « Warum ? » [- Pourquoi ?]

Lui – « Fur die letzte mal… » [- À cause de la dernière fois…]

Moi – « Eine Frage, warum die zwei erste protest keine problem und jetzt … » [- Juste une question : pourquoi n’y a-t-il pas eu de problèmes pour les deux premières manifs et maintenant… ]

Lui – « Keine Frage ! » [- Pas de questions !]

Moi – « Nein, ich bleibe hier. » [- Non, je reste ici.]

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POÉSIE / 1 an d’incarcération, toujours poète…

Voici un nouveau poème écrit par Loïc à la prison de Hambourg. 13 mois maintenant que notre ami a été arrêté et 1 an bientôt qu’il se trouve privé de liberté derrière les barreaux de la prison de Holstenglacis à Hambourg. 1 an à la disposition de la justice qui n’en finit plus de le juger, d’accumuler les audiences dans l’interminable procès de l’Elbchaussee afin de faire émaner la vérité comme iels disent. Pour nous la vérité est simple : coupable ou innocent, cela n’est pas notre affaire, Loïc se bat pour la liberté et nous exigeons qu’il retrouve la sienne au plus vite ! S’iels sont incapables de prouver quoique ce soit contre lui, qu’iels le libèrent !

Liberté pour Loïc, liberté pour toutes les personnes incarcérées !

Non seulement Loïc continue d’écrire des vers mais il n’a rien perdu de son humour comme en témoigne cette enveloppe reçue récemment et qui nous a été transmise.

Vos cages sont bien trop petites pour enfermer tout ce qui emplit nos coeurs.

ANALYSE / L’enquête post-G20 en Suisse

À lire ces jours ci, cet article publié par sur le site suisse renverse.info, pendant helvétique des sites d’informations libertaires du réseau Mutu (Manif-est.info en Lorraine, Paris-luttes.info en région parisienne etc.).

On y apprend les détails de l’enquête qui a mené les flics de Hambourg sur la piste des suspects suisses supposément impliqués dans les émeutes de l’Elbchaussée en 2017 (tout comme Loïc), comment ils ont été espionnés, traqués, arrêtés… puis relâchés dans le mesure où la Suisse, elle, a pour tradition de ne jamais extrader ses ressortissants.

Surveillance : l’ampleur de l’enquête du G20 en Suisse

Neuf mois après le sommet du G20 à Hambourg en 2017, la police a frappé simultanément à trois endroits en Suisse : le 29 mai 2018, à 6 heures du matin, une personne recherchée a été interpellée et temporairement arrêtée près de Winterthur, dans le canton de Zurich. Deux autres endroits ont fait l’objet d’une descente policière en même temps. Lors de celles-ci, divers supports de stockage électroniques, des téléphones et d’autres articles ont été confisqués. Mais comment s’est déroulée en amont l’enquête de l’opération nommée « Alster » ?

Nous avons eu accès à une partie des dossiers de la police cantonale d’Argovie et avons décidé de publier les informations que nous y avons trouvées – pour montrer l’étendue de la surveillance policière, pour partager des informations sur le fonctionnement des autorités répressives dans de tels cas et pour avoir de la matière pour se défendre et protéger dans de futurs cas de surveillance. Mais comme nous l’avons déjà dit, nous supposons que nous n’avons eu accès qu’à une fraction des documents que les enquêteur·rices ont utilisés.

L’Opération Alster

En décembre 2017, les autorités judiciaires de Hambourg publient des photos de personnes accusées d’avoir participé aux manifestations contre le sommet du G20, et demandent l’aide à plusieurs États européens pour identifier les personnes recherchées. En janvier 2018, la police cantonale argovienne répond en affirmant qu’elle a trouvé une des personnes recherchées. Le Parquet de Hambourg dépose une demande d’entraide judiciaire le 16 mars 2018 et sollicite l’aide de l’Office Fédéral de la Justice pour l’ »affaire de l’Elbchaussee ». La demande d’entraide judiciaire se fonde sur les infractions « d’émeute » en concours avec « incendie intentionnel ». [1] Dans sa demande, le Parquet de Hambourg requiert les mesures de surveillance suivantes :

  • Surveillance de communications téléphoniques : Surveillance et enregistrement des télécommunications, numéro de téléphone et des connexions internets.
  • Évaluation des données relatives au trafic de téléphones mobiles au cours des six derniers mois.
  • IMSI-Catcher pour la détermination de numéros de téléphones mobiles, de cartes SIM et de leurs localisations.
  • Surveillance de la personne accusée, demandant explicitement la permission d’utiliser des émetteurs GPS à cette fin. Les résultats de l’observation doivent également être documentés avec des photographies, des données personnelles et des données sur le véhicule.
  • Perquisition du domicile, incluant les chambres d’habitation, les salles annexes et les locaux techniques.
  • Une fois ces mesures prises, interrogatoire du prévenu. Une « liste appropriée de questions peut être envoyée en temps voulu », écrit le Parquet de Hambourg.

La surveillance est mise en place durant un peu plus de deux mois. Avec l’exception de l’évaluation des données du téléphone portable, qui sont de toute façon conservées pendant six mois, conformément à la loi suisse.

Lire la suite de l’enquête sur renverse.info