À l’occasion du passage à Metz de l’Atomik Tour, il y a quelques semaines, une récitation et une action publique ont eu lieu, en soutien à Loïc et aux autres prisonnier.e.s de la lutte antinucléaire. Voici la vidéo de ce joli moment.
Le site de l’Atomik Tour, la grande caravane antinucléaire qui sillonnera la France jusqu’en août prochain : atomik-tour.org
Deux audiences du procès de l’Elbchaussee ont eu lieu cette semaine. La première, très courte, n’a permis que d’entériner des détails techniques. La seconde en revanche s’est étalée sur toute la journée de jeudi et s’est conclue par l’exclusion du public !
Sur demande du procureur (qui représente l’Etat dans ce procès), le public, les proches des accusés ainsi que la presse ont été renvoyés. La juge a justifié cette décision à laquelle les accusés et leurs avocat.e.s se sont vivement opposé.e.s en se servant de la présence de deux mineurs parmi eux. Ils n’avaient pas 18 ans au moment des faits qui leurs sont reprochés et comparaissent donc sous le régime de la justice « juvénile » qui, en Allemagne, prétend « éduquer » plutôt que « punir » (ils encourrent tout de même 3 ans de prison ferme). La cour a donc estimé que le public venu massivement soutenir les 5 accusés était de nature à faire pression sur eux, à les destabiliser et à empêcher qu’ils ne se confessent et présentent des excuses. La solidarité exprimée envers eux aurait valeur d’encouragements ce qui les empêcheraient de regretter les actes dont on les accuse. La juge a donc choisi de « les protéger » de leurs proches afin de pouvoir « les éduquer » !
Durant les prochaines semaines, seul un membre de la famille de chaque accusé sera autorisé à être présent à ses côtés le temps de l’audience. Le procès ne rouvrira au public et à la presse que lors des plaidoiries (en mai probablement). Les débats porteront alors sur des dizaines de « preuves » dont personne parmi le public ou les journalistes n’aura eu connaissance.
Chacun sait que la justice n’est qu’un théâtre grossier où les riches et leurs supplétifs s’en prennent aux pauvres et aux rebelles. Or, ce théâtre ne se vaut pas toujours. Il est souvent expéditif, bâclé. Il semble parfois trop huilé, comme joué d’avance, pauvre en dramaturgie. La pièce qui s’est ouverte mardi 18 décembre au matin au tribunal d’Hambourg s’annonce tout à la fois haletante (29 audiences étalées sur les six prochains mois) et plus surprenante que prévue. En cause, un scénario fort mal écrit, une embarassante erreur de casting et une intervention inattendue. Décryptons.
Le pitch de départ est connu. D’un côté nous avons la ville d’Hambourg, ses flics et sa justice en quête d’une revanche après l’humiliation subie lors des émeutes qui ont ruiné leur G20 en 2017. Cette partie-là a mis les gros moyens pour se fabriquer un succès retentissant. La promotion du procès a largement été faite dans les médias. Les appels à délation, perquisitions, mandat d’arrêt européen et autres arrestations à l’étranger ont donné l’illusion d’un travail efficace des enquêteurs (cent quatre-vingts agents à temps plein pendant 15 mois, tout de même). De l’autre, il y a les cinq co-accusés, démasqués, traqués, arrêtés et détenus (pour trois d’entre eux), ils doivent payer pour les faits qui leurs sont reprochés : leur participation au saccage express de l’Elbchaussee, une rue huppée d’un quartier bourgeois de la ville, au matin du vendredi 7 juillet. En quelques minutes, cette balade contre la rencontre des dirigeants les plus riches de la planète aurait causé plus d’un million d’euros de dégâts, s’attaquant systématiquement aux symboles de l’argent et du pouvoir ; banques, consulats, voitures et commerces dont un fameux magasin scandinave d’ameublement merdique.
D’un côté donc, cinq jeunes gens de moins de 25 ans, quatre allemands et un français. De l’autre, une armada de policiers, juges, politiciens et journalistes convaincus de leur culpabilité. Mais, de quelle culpabilité parle-t-on exactement ? Voici l’énigmatique question qui n’a pas manqué de surgir aux yeux de tous lors de la première journée d’audience.
Cher.e.s amies,
Voici un nouveau poème de Loïc, écrit depuis la prison de Hambourg. De quoi se donner du courage, de la force et de l’énergie pour attaquer cette nouvelle année. Qu’elle vous soit belle et magique, faite de luttes et d’amitiés, partout où cela est nécessaire, autrement dit partout.
Le procès reprend le 8 janvier (audience de 15 minutes seulement) puis le 10 (audience plus longue).
À bientôt !
Gagner sa perte
Tu as gagné ta vie mais a perdu la terre, Tu as gagné ta vie aux labeurs d’autres frères, Et de sœurs qu’on oublie, toutes ces femmes condamnées, En ce qui les maquillent pour pouvoir exister.
Qu’il est pauvre le cœur des civilisations, Qui ne bat qu’au labeur de ses exploitations, Et toutes ces connaissances au prix des destructions, Pour saisir l’évidence : nature est perfection.
Je veux boire l’eau des fleuves mais elle n’est plus potable Et les agriculteurs sont devenus comptables, Pendant que des idiots veulent irradier le sol, Nucléaire fléau stoppant sa course folle.
Je ne peux plus le faire depuis là où je suis, Mais chante à l’univers que se lèvent d’autres vies, Pour sauver les forêts, libérer des espaces, De ce joug du progrès qui progresse en l’impasse.
Soirée du 24 novembre 2018, prison de Hambourg.
Photo : à Sivens où la forêt avait été rasée pour un barrage qui ne verra jamais le jour, la nature reprend peu à peu (difficilement) ses droits.
Voici un poème écrit par Loïc le mois dernier. Une pensée solidaire pour toutes les personnes enfermées aujourd’hui, partout, quelques soient les motifs. Il n’y a pas de prison légitime.
Liberté pour toutes ! Oh toi sainte justice qui s’est prise pour Dieu, Condamnant aux supplices mon âme dans ce lieu. Je demande ta grâce, la réincarnation, Pour que ton joug s’efface en douces condamnations.
Je veux être au Mirail armé d’un bon bâton, Pour qu’à nouveau sommeillent étudiantes rébellions. Car là-bas tu pardonnes en douce sélection, Les violences qui fredonnent l’air des institutions.
Je veux être un soldat qui tue à l’étranger, Pour l’intérêt bourgeois de quelques pétroliers. Bercé par la chanson des pacifications, Moi le grand chirurgien des frappes de précisions.
Je veux être un fasciste, qui coule les bateaux, Des migrants qui persistent à fuir tous les fléaux, Qu’on sème à l’étranger nous les trafiquants d’armes, Des ressources exploitées l’origine des larmes.
Ou être de ces gens qui préparant attentat, Contre des musulmans il y a quelques mois. Au cours des magistrats sous leurs lois scélérates, Faut croire que c’est moins grave quand on est d’extrême droite.
La suite de l’histoire, Jack London l’a écrite, Dans le Talon de Fer année [1] dix-neuf-cent-huit. Mis à part rajouter chapitre climatique, Son œuvre préméditait la fasciste réplique.
27 novembre 2018, prison de Hambourg.
[1] Roman de Jack London préfigurant la société capitaliste poussée à sa forme extrême : le fascisme.↩